Japon

A voir autour de Tokyo

A voir autour de Tokyo

Pour vivre bien ce que propose une mégapole, il faut pouvoir s’en extraire et respirer hors d’elle, avant de retourner au rythme et à l’emballement. Les trains au départ de Tokyo permettent de rallier des spots multiples avec une ponctualité remarquable. La question est donc : qu’y a-t-il à voir autour de Tokyo ? Ou plutôt, parmi tout ce qu’il y a, que choisir ? Du mont Fuji aux temples de Nikkô, de Yokohama aux onsen d’Hakone, des vignobles de Yamanashi aux ryokan de Shuzenji, du bouddha de Kamakura au mont Mitake, voici quelques idées.

 

  1. Le mont Fuji - Kawaguchiko, Yamanashi, Hakone
  2. Shizuoka
  3. Shuzenji, péninsule d’Izu
  4. Kamakura
  5. Yokohama
  6. Nikkô
  7. Kawagoe
  8. Les monts Takao et Mitake

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Le mont Fuji et ses abords - Kawaguchiko, Yamanashi, Hakone

A tout seigneur tout honneur. On ne snobe pas le mont Fuji. Stratovolcan parfait, carte postale idéale, montagne sacrée, challenge artistique, motif kitsch, terrain de randonnée, pèlerinage national, rêve touristique, peu importe, il peut être tout cela sans rien perdre de sa suprême élégance. Alors, pourquoi ne pas s’en approcher ? Une journée le permet. Et tout de même, l’avoir vu en vrai, d’assez près pour le jauger sérieusement, ça vous upgrade un voyage au Japon.

Pour un bon point de vue sur la montagne, direction le Kawaguchi, l’un des cinq lacs fameux qui la bordent au nord. On prend le train à la gare de Shinjuku et hop ! Les Japonais le font nombreux ; la nappe d’eau, en dehors de servir la montagne comme sur un plateau, permettant de faire de la planche à voile, de naviguer, de pêcher le carassin blanc. La fréquentation est donc conséquente. Les gens n’ont pas attendu pour découvrir les bons coins. Et s’ils partent du lac pour attaquer l’ascension du Fuji, il y a des raisons, pratiques et esthétiques. Puisque nous sommes dans la préfecture de Yamanashi, il faut signaler encore qu’elle produit des fruits - en variété, quantité et qualité. Des raisins notamment, qui fournissent leur matière première aux vignerons japonais. Ces derniers sont moins célèbres sans doute que le motif favori d’Hokusai, mais on les découvre avec curiosité et intérêt. Le cépage koshu, cultivé sur des tonnelles, permet de produire un blanc savoureux évoquant à certains connaisseurs le muscat alsacien.

De là, si l’on tourne autour du mont Fuji dans le sens des aiguilles d’une montre, on parvient à Hakone, district d’Ashigarashimo, préfecture de Kanagawa. L’endroit est célèbre au Japon - et ailleurs - pour le lac Ashi, miroir du Fuji, et pour ses onsen, sources chaudes ayant depuis mille ans et plus donné lieu à une activité thermale à visées multiples. Certains établissements du secteur sont devenus au fil du temps des conservatoires de l’art de vivre japonais, bien au-delà des ablutions.

Hakone et Mont Fuji

Tawintaew/Getty Images/iStockphoto

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Shizuoka

Cap au sud-ouest toujours : en quarante minutes de Shinkansen, on gagne Shizuoka. La variété naturelle, celle des activités humaines, le patrimoine culturel (constitué surtout pendant la période d’Edo) et la mer font de cette préfecture un concentré de Japon. Les habitants de Tokyo y vont volontiers chercher un contrepoids à leur quotidien survitaminé. C’est que la présence tutélaire du mont Fuji exerce ici encore une influence bénéfique. Entre Shizuoka City et Hamamatsu, les plantations de thé que domine le grand cône sont un spectacle d’un admirable équilibre. Par la netteté des traits, le vert franc des théiers, les neiges éternelles et le bleu du ciel, une belle journée vous laisse à l’âme une empreinte ineffaçable. Ceux qui ressentent le besoin de scènes plus mouvementées peuvent néanmoins, pour contempler le mont, contourner la baie de Suruga et aller jusqu’à Numazu sur la péninsule d’Izu. La montagne ne perd rien à une avant-scène marine, au contraire !

paysage de Shizuoka

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Shuzenji, péninsule d’Izu

La péninsule d’Izu, qui appartient à la préfecture de Shizuoka, est d’ailleurs une belle illustration du Japon quintessentiel qu’est la région. Côtes dentelées, relief montagneux qui sait se montrer aigu et dramatique sans être très haut, emprise forestière : l’image traditionnelle du pays a ici un modèle. La côte sud-ouest est classée monument national pour la beauté de ses paysages et sa valeur culturelle. L’agriculture locale produit deux ingrédients indissociables de la table japonaise : le champignon shiitake et le wasabi. Toutefois, les onsen sont sans doute l’attraction n° 1. Et Shuzenji, à l’ouest d’Izu City, offre les meilleures conditions pour en profiter. La conjonction d’une source dont l’origine serait miraculeuse, Tokko no Yu, et d’un environnement ravissant, a fixé les formes classiques du thermalisme nippon. Auberges ryokan, bains, temples, forêts de bambous, couverts d’érables, cerisiers, pruniers, rivière, la promenade est subtilement évocatrice et touchante. De grands écrivains, comme Kawabata Yasunari ou Natsume Sôseki, échappaient ici aux bouleversements de leur temps. Pour rejoindre Shuzenji, compter 45 minutes de Shinkansen, plus 30 de desserte locale.

Shuzenji

Getty Images/iStockphoto

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Kamakura

Celui qui passe devant le bouddha Amida de Kamakura souscrira sans doute aux vers de Rudyard Kipling, il peut sentir the Soul of all the East about him at Kamakura. C’est que cette statue de bronze monumentale du Kôtoku in, temple de l’école de la Terre pure, est une prouesse à la fois technique et spirituelle. L’édification a été commencé au milieu du XIIIe siècle et a demandé une douzaine d’années. A cette époque, Kamakura, sur la péninsule de Miura, était la capitale du Japon. L’impermanence des affaires humaines a emporté ailleurs le pouvoir politique ; le bouddha est resté. Son poids - 93 tonnes - et sa méditation empêchant qu’il soit déplacé. Ce sont donc les fidèles bouddhistes qui se sont mis en marche. Et puis les voyageurs, qui ne manquent pas d’être impressionnés par le format et la concentration. Cette présence paradoxale inspire le respect. Que fait-on ensuite ? Eh bien, on va à la plage ! Car Kamakura est aussi une station balnéaire. Ou on monte aux temples des hauteurs derrière la ville. Ou on visite le Tsurugaoka Hachiman gû, grand et vénérable sanctuaire shintô. De Tokyo, il faut environ une heure de train pour rejoindre Kamakura. Y voit-on le mont Fuji ? Bien sûr.

bouddha de Kamakura

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Yokohama

On reste dans le Grand Tokyo en se rendant à Yokohama en 30 minutes de train. Ce port a pris essor au XIXe siècle, après la signature des traités commerciaux avec les puissances occidentales. Aujourd’hui, l’activité économique est bien sûr sans commune mesure avec celle d’alors. La mondialisation impose ses ordres de grandeur et Yokohama prend sa part des échanges de matières premières et de passagers. La ville regarde vers l’avenir ; des installations portuaires ultra modernes le lui permettent. Elle est un peu à Tokyo ce que le Pyrée était à Athènes. On y trouve en outre le plus grand Chinatown du Japon. C’est l’ouverture du port qui a attiré les premiers marchands chinois et l’installation de quelques-uns d’entre eux. Par la suite, le quartier s’est développé ou contracté au gré des événements internationaux. Aujourd’hui, il est intégré à la circulation touristique étrangère mais aussi domestique. Les Japonais fréquentent nombreux les restaurants, salons de thé, boutiques, etc., aux enseignes électriques si caractéristiques. Les portes, les temples à la chinoise tranchent par leur volubilité ornementale avec certains de leurs homologues autochtones ; ils s’accordent avec d’autres. Le cousinage culturel est plein de nuances et d’enseignement.

port de Yokohama

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Nikkô

150 kilomètres au nord de Tokyo, à vol d’oiseau, et au bout de 2 heures de train, se trouve Nikkô, dans la préfecture de Tochigi. Tout autour, un parc national important protège des reliefs volcaniques anciens, des plateaux, cours d’eaux, cascades et sources chaudes, des forêts de pins, de cèdres vénérables, de sapins, d’érables. On va d’une beauté à l’autre, en changeant de point de vue et d’échelle. Ce peut être un sentier sous-bois pailleté de rayons filtrés par les feuillages ; ce peut être, dans l’échancrure d’un pan de roche, une longue cascade bouillonnante ; ce peut être encore la vue large d’un paysage à plans bousculés. Ou l’envol brusque et un peu lourd d’un faisan versicolore, l’oiseau national du Japon. Le macaque japonais, au pelage clair et à la face rouge, est un autre habitant du parc. Ces conditions naturelles ont depuis longtemps attiré la ferveur religieuse et les esprits méditatifs. Une centaine de temples historiques sont installés à Nikkô, que l’Unesco a inscrits au patrimoine mondial. Le sanctuaire shintô Nikkô Futarasan, fondé au VIIIe siècle, est l’un des plus importants - le pont sacré (du XVIIe siècle) sur la Daiya installe une étonnante harmonie. Le Nikkô Tôshô gû, autre sanctuaire shintô fondé neuf siècles plus tard, recèle lui aussi des trésors d’architecture. Quant au Rinnô ji, bouddhiste, fondé au VIIIe siècle, il ne leur cède rien en distinction.

Excursion à Nikkô

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Kawagoe

Il faut 45 minutes de train pour se rendre à Kawagoe, dans la préfecture de Saitama, au nord-ouest de Tokyo. Et ces trois quarts d’heure vous font faire un bond de près de 200 ans dans l’histoire. Car la ville a conservé un centre ancien rare, dominé par une emblématique tour de l’horloge. Des maisons de bois, mais aussi des maisons-entrepôts en dur que les marchands locaux ont faites édifier à la mode d’Edo (qui deviendrait Tokyo). Cet ensemble prolonge sa vocation mercantile sous forme de boutiques et de restaurants, non sans générer une certaine nostalgie du bon vieux temps. Il montre aussi que le commerce local avait su tirer profit du développement de la capitale. La patate douce est une production du coin. Elle est transformée de diverses façons, mais la plus appréciée est la confiserie. Pour y goûter, on se rend à Candy Alley. Comme son nom l’indique, cette rue a pour vocation d’envoyer les gens chez le dentiste ou, dans le pire des cas, chez l’endocrinologue. Ce qui ne semble pas troubler la chalandise. Parce que c’est très bon ce qu’on peut trouver là !

>> A la découverte des puces de Kawagoe

 

rue de Kawagoe

Jérôme Galland

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Les monts Takao et Mitake

Voulez-vous retrouver les Tokyoïtes le week-end ? Le mont Takao, au sud-ouest d’Hachiôji, préfecture de Tokyo, est un excellent endroit. Les habitants de la capitale aiment beaucoup faire les 50 minutes de train qui y conduisent, puis 1h30 de crapahut pour le sommet (ou moins, si l’on choisit de prendre le funiculaire qui épargne aux moins vaillants la moitié du chemin). De là-haut, panorama de Tokyo, Yokohama et, par temps clair, pointe du Fuji. On a le choix entre plusieurs itinéraires balisés. Le principal est très aménagé et certains jours, ou à certaines périodes de l’année, très fréquenté, notamment à la saison des érables rouges. Certains chemins sont tout de même moins frayés. On peut y trouver sinon une solitude, du moins de l’espace et du calme. Et surprendre la jolie tourterelle orientale. C’est l’éternel dilemme : ils ont raison de venir tous ces gens, parce que c’est très beau. Cependant, comment jouir des choses tous ensemble ? Choisir, choisir ses jours, ses heures, ses sentiers. Et aimer ses congénères.

Enfin, si la fréquentation décidément vous gâchait la partie, essayez le mont Mitake, un peu plus loin - 1h30 de train - dans le parc national Chichibu Tamakai. La montée s’effectue en funiculaire et on se balade ensuite sur les hauteurs, autour d’un sanctuaire shintô.

Mont Takao

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Par

EMMANUEL BOUTAN

 

Photographie de couverture

PIA RIVEROLA