Oman

Au pays de Sinbad

Au pays de Sinbad

Un petit bijou glissé entre mer de sable et Océan Indien, mélange de déserts, de montagnes, de fjords et de wadis luxuriants : Oman joue le trait d’union entre l’Inde et l’Afrique. De sa civilisation millénaire, ce sultanat singulier a su garder l’identité et les valeurs.


Vasco de Gama leur doit une fière chandelle. Lorsqu’à l’aube du XVIe siècle, les caravelles portugaises remontèrent vers le nord après avoir doublé le Cap de Bonne Espérance, ce sont les marins omanais, voguant sur leurs modestes dhows, qui les guidèrent vers la route des Indes. Comme en témoigne le kumma, chapeau brodé de Zanzibar toujours porté sur les ports de Sur et de Mirbat ou encore les influences indiennes dans la cuisine de Mascate et dans les maisons de la corniche de Muttrah, ce petit sultanat fut le centre d'un véritable empire colonial.  Pendant des siècles, les boutres de teck assurèrent le transport des épices et de l’encens, régnant sur les mers, du Balouchistan à l’Afrique de l’Est. Leurs fiers marins inspirèrent à Shéhérazade le personnage de Sinbad qui aurait vécu à Sohar, un port du Nord omanais.

Village abandonné de Ghul

Depuis les Mille et une Nuits, le pays n’a pas tant changé. Les 500 forteresses laissées par les Perses et les Portugais se dressent toujours fièrement à travers déserts, wadis et échancrures côtières, tout comme les maisonnettes de pisé dans les villages et les tentes des bédouins dans le désert. L’encens que les Roi Mages transportèrent jusqu’en Palestine est toujours cultivé au sud de la péninsule, dans cette improbable enclave bordant le Yémen nommée Dhofar, qui affiche un insolent climat tropical et exhibe autour de Salalah une folle végétation de cocotiers, de bananeraies et de champs d’ananas au pied de l’un des déserts les plus arides du monde.

Wadi Bani Awf à Oman

Surnommé « Empty Quarter », ce désert de Roub al-Khali, ponctué de djebels escarpés et de dunes rouges et blondes, occupe les trois quarts du pays. Il est depuis les années 60 percé des puits de pétrole qui ont amené la prospérité. Le sultanat ne s’est pas transformé pour autant en sapin de Noël, à l’image de certains de ses voisins. Sans doute grâce au Sultan Qaboos. Descendant d’une longue dynastie mais élevé dans une académie privée du Suffolk, cultivé et raffiné, amateur d’opéra (il en a construit un fabuleux dans la capitale) l’héritier n’a pas hésité à l’âge de 30 ans à renverser son despote de père pour propulser en douceur son pays du Moyen-âge à l’ère des ordinateurs. Concédant le droit de vote aux femmes, maintenant la paix avec les autres pays du Moyen-Orient, il a encouragé la pratique de l’ibadisme, courant pacifique et tolérant de l’islam. Juste à côté de son palais de Muscat, une vielle église catholique sonne d’ailleurs toujours la messe ! Il a aussi interdit la chasse, sauvant les oryx du désert et les tortues vertes de la mer d’Arabie qui viennent de nouveau pondre sur la plage de Ra’s al-Had. Aujourd’hui, 85 % de la population est alphabétisée et les écoliers apprennent l’anglais.

Péninsule du Musandam nageurs

Une  manière courtoise d’encourager les Omanais, fiers de leur pays, à accueillir  les visiteurs de bon cœur. Promenez-vous dans les souks de Mascate, la capitale ; sur la route des citadelles se faufilant entre les sommets du Djebel-Akhdar qui bordent en arc-de-cercle sa plaine plate et fertile ; dans les villages nichés au creux de la fraîcheur des wadis, ces oueds qui irriguent les luxuriantes palmeraies ; au bord des sources chaudes ou dans le désert où les Bédouins font vivre encore la grande tradition caravanière : vous ne rencontrerez que de chaleureux sourires. Autour de Mascate, de ses souks et des maisons 18e qui bordent sa corniche, une poignée d’hôtels de grand luxe a poussé, offrant le rêve éveillé d'un soleil d'hiver brillant sur des côtes pratiquement vierges. Comme il est doux de se prélasser quelques jours au bord de la piscine sans fin du Chedi (103 mètres de long) avant d’emprunter une route s’enfonçant dans les terres et rejoindre un camp de tentes planté dans les sables rouges du désert pour un bivouac romantique dans les dunes.

Jebal Shams

A l’extrême nord du pays, le Musandam, sorte de virgule de terre isolée et postée comme une sentinelle au bord du détroit d’Ormuz pourrait évoquer la Norvège, tant ses fjords sont vertigineux, si la mer en éclats d’émeraude peuplée de colonies de dauphins ne venait en lécher les pieds. C’est dans ce paysage de blancheur aveuglante et de mystère que s’est niché l’un des refuges les plus chics  du pays, Zighy Bay. Ainsi est Oman : isolé du reste de la péninsule arabique par des dunes brûlantes, séparé des Indes par l’océan, mais peuplé de trésors de douceur. Un pays de légende qui promet des aventures aussi magiques que celles de Sinbad.

 

 

Photographies

JEROME GALLAND