Elle n’a pas le charme enchanteur de Buenos Aires ni les plages de Rio. Bien souvent, elle n’est qu’une étape sur la route de la Patagonie ou du désert d’Atacama. Pourtant, avec son histoire tumultueuse, sa vue imprenable sur la cordillère des Andes, sa vie culturelle riche et sa scène gastronomique en pleine ébullition, Santiago est une ville fascinante pour peu que l’on prenne le temps de s’y attarder. La preuve en 48h.
Jour 1
10h
De la plaza de Armas à Bellas Artes
On commence notre balade par la plaza de Armas, le cœur historique de Santiago. On flâne à l’endroit où Pedro de Valdivia fonda la ville au XVIe siècle. La statue équestre du conquistador trône au centre de la place, à proximité de la cathédrale de la ville. Quelque peu interlope une fois le soir venu, le centre historique grouille d’animation en journée. On esquive les vendeurs ambulants et les artistes de rue et l’on entre dans les galeries marchandes surannées où rien ne semble avoir bougé depuis les années 80. On remonte par la charmante rue Merced qui s’aventure jusqu’au quartier avant-gardiste et gay friendly de Bellas Artes. On s’arrête pour un café en terrasse à Emporio La Rosa avant de passer une tête dans le musée des Beaux-Arts. Ce joli bâtiment inspiré du Petit Palais parisien abrite une très belle collection d’œuvres réalisées par l’artiste chilien surréaliste Roberto Matta.
OSORIOartist / Adobe Stock
Museo de Bellas Artes, José Miguel de la Barra 650, Santiago
13h
Casser la croûte au Lomit's
Chez Lomit’s, le concept essentiellement chilien de fuente de soda atteint son paroxysme. Il n’y a pas plus local que ce type de restaurant à mi-chemin entre le diner américain et la brasserie française, où l’on se régale de juteux sandwichs et plats du jour préparés avec amour. Ici, la carte n’a pas changé depuis des décennies et c’est tant mieux ! Des serveurs endimanchés en gilet et nœud papillon virevoltent autour des tables à nappes à carreaux. On opte pour le chacarero, un curieux sandwich composé de viande grillée, de rondelles de tomate, de mayonnaise et de haricots verts. Aussi intrigant que délicieux.
Alix Pardo
Lomit’s, Av. Providencia 1980, Providencia
16h
Vie de bohême à Bellavista
Avec ses maisons basses aux murs pastel et ses rues pavées bordées d’arbres, le quartier de Bellavista est le refuge de la bohême santiaguina. C’est ici, au pied du cerro San Cristobal, que Pablo Neruda fit édifier sa maison, La Chascona, où il vécut avec la chanteuse Matilde Urrutia. Aujourd’hui convertie en musée, l’ultime demeure du poète, charmante et biscornue, foisonne d’objets, de dessins et de tableaux qui permettent de mieux appréhender la personnalité fantasque de l’artiste. Une fois la visite terminée, il est temps de prendre de la hauteur…
Alix Pardo
La Chascona, Fernando Márquez de La Plata 0192, Providencia
18h30
Si tu vas à Santiago, n'oublie pas de monter là-haut
On accède au sommet du cerro San Cristobal – qui culmine à 865 mètres d’altitude – en téléphérique, voire à pied ou à vélo pour les plus courageux. Du haut de la colline, la vue sur la ville, immense en contrebas, est magnifique. Tout comme le panorama sur l’imposante cordillère des Andes qui semble protéger la ville et fait planer une ombre bienveillante sur les quartiers chics à l’est. On profite du coucher de soleil et des lumières qui scintillent à perte de vue.
Alix Pardo
20h
Dîner chez Liguria
Ce restaurant est une institution où l’on mange et boit gaiement. Toute la culture populaire chilienne s’étale sur les murs recouverts d’affiches publicitaires d’un autre temps, de photos d’équipes de football jaunies et de dictons chiliens calligraphiés. On y dévore de délicieux plats traditionnels, comme le chupe de jaiba (gratin de crabe) ou la mechada italiana (viande de bœuf effilochée) en buvant une chope de bière bien fraîche ou un bon verre de cabernet sauvignon. Plus la soirée avance et plus l’ambiance s’électrise.
Alix Pardo
Liguria, Manuel Montt. Av. Providencia 1353, Providencia
23h
Un sour à la Providencia
Le Chili et le Pérou se disputent la paternité du pisco, un alcool distillé à base de marc de raisin. Difficile d’arbitrer cette querelle de clochers. Mais une chose est sûre : le pisco sour de la Providencia, bar trendy du quartier de Las Condes, est difficilement battable. Au comptoir, on commande donc le cocktail national, préparé à base de jus de citron, de pisco et d’un blanc d’œuf dûment shakés. Puis on glisse jusqu’au speakeasy auquel on accède via une porte secrète. À vous de trouver l’entrée !
Claude Piche/Unsplash
Bar La Providencia, Isabel La Catolica 4208. Las Condes
Jour 2
10h
Prendre une claque au musée de la Mémoire et des Droits humains
De 1973 à 1989, le Chili a vécu sous le joug de la terrible dictature du Général Pinochet. Un régime militaire qui tortura des milliers d’opposants politiques, fit 2298 morts et 1209 disparus. C’est cette histoire noire que raconte ce musée crée par l’ancienne Présidente Michelle Bachelet (fille d’un général assassiné par le régime). L’endroit, passionnant et poignant – sans jamais être sinistre –, a été édifié pour que les violations des droits humains commises par la dictature ne soient jamais oubliées et que soit construit sur le passé un futur plus heureux. Une visite ô combien instructive et indispensable.
Jorge Barrios / Wiki Commons
Museo de la Memoria y de los derechos humanos, Av. Matucana 501
12h
Chiner dans le barrio Italia
Changement d’ambiance et bascule vers plus de légèreté : direction le barrio Italia. Dans ce quartier, qui a connu ces dernières années une vraie transformation, les antiquaires ont remplacé les ateliers mécaniques. Les artistes sont arrivés. Les friperies et les cafés branchés se sont installés dans de vastes entrepôts. Désormais, le coin est parfait pour chiner bibelots, meubles et vinyles dans une ambiance bobo-chic. On apprécie particulièrement le Galpón Flea Market et sa super sélection de fripes et de charmantes vieilleries. On pourra y dénicher une veste en jean vintage aussi bien qu'un téléphone à cadran rotatif.
Alix Pardo
Galpón Flea Market, Caupolicán 455, Ñuñoa
14h
Dévorer un lomito à la Fuente Alemana
Attention légende. Depuis 1937, les cuisinières de la Fuente Alemana (littéralement « fontaine allemande ») confectionnent d’immenses sandwichs que les habitants de Santiago dégustent en nombre au comptoir. On s’assied sur un tabouret accoudé au zinc exigu et l’on commande un lomito palta mayo. Ce sandwich associe une viande de porc juteuse revenue à la plancha à une mayonnaise maison absolument délicieuse et une incroyable purée d’avocats chiliens. Un délice.
Fuente Alemana, Av. Pedro de Valdivia 210, Providencia
15h30
S'attarder à Lastarria
La rue Lastarria, qui a donné son nom au quartier, est l’une des plus agréables de la capitale chilienne. L’ambiance y rappelle un peu celle de Montmartre, à Paris. La zone regorge de petits cafés, de bars à vins sympas et de boutiques indépendantes pas dénuées de cachet. On flâne entre théâtres, disquaires et cinéma d’art et d’essai, s’arrêtant au gré des envies. Pourquoi ne pas s’offrir par exemple un recueil de poésie ou un roman avant-gardiste dans une librairie du quartier ? De Roberto Bolano à Alejandro Zambra, en passant par Pedro Lemebel ou Paulina Flores, la littérature chilienne regorge d’auteurs incroyables. On pourra aussi s’attabler en terrasse chez Bocanariz, un bar qui fait la part belle aux cépages méconnus et aux vins d’auteurs. L’occasion de faire de belles découvertes.
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Bocanariz, José Victorino Lastarria 276, Santiago
20h
Expérience culinaire unique chez Boragó
Rodolfo Guzman est un drôle d’oiseau. Depuis 2012, ce cuisinier s’est mis en tête d’arpenter son longiligne pays pour y dégoter des ingrédients méconnus et les inviter à la table de son restaurant gastronomique. Chez lui, on découvre ainsi la rica-rica, une plante du désert d’Atacama, les champignons des terres mapuches ou encore les merveilleux fruits de mer de l’océan Pacifique réunis au sein d’un menu dégustation de très haute volée. Un repas incroyable doublé d’une déclaration d’amour à la nature et à son pays.
Boragó, Costanera Sur S.J.E. de Balaguer 5970, Vitacura
Par
ARTHUR JEANNE
Photographie de couverture : Thiago/Adobe Stock