Derrière les massifs alpins et les lacs scintillants, il existe une Suisse des villes et une Suisse des champs. On passe de l’une à l’autre en train, tandis que défilent par la vitre des panoramas émouvants.
Sublimi-cimes
De retour des Alpes suisses, Victor Hugo écrivait : “Le touriste y vient chercher un point de vue ; le penseur y trouve un livre immense où chaque rocher est une lettre, où chaque lac est une phrase, où chaque village est un accent […].” (En voyage, tome II, éd. 1910). Précurseur, il relate l’avènement, dès le début du XIXe siècle, des stations suisses comme lieux de villégiatures prisés des Européens. Il faut dire que, les Alpes couvrant près des deux tiers de son territoire, la Suisse a de belles cartes à jouer. Au sud, les hauts reliefs qui habillent le Valais dépassent souvent les 4000 mètres – parmi eux, le Cervin, reconnaissable à sa pointe.
On skie chic en hiver, on randonne smart en été. La proximité avec la Méditerranée apporte cette lumière éclatante qui sied bien aux décors de montagne. À l’est, dans les Grisons, chamois, cerfs et marmottes s’épanouissent au milieu des edelweiss et des jonquilles. Aux beaux jours, on pédale électrique et on dévale les rapides en raft. La station de Saint-Moritz, elle, a été choisie à deux reprises pour accueillir les JO d’hiver (1928, 1948). Le discret Jura, pour n’être pas aussi vertigineux, n’en incarne pas moins la montagne dans ses mythes et sa splendeur.
Villes d’eau, villes d’art
Derrière la carte postale naturelle, la Suisse reste résolument urbaine. Encastrée au milieu de l’Europe, on y parle allemand, français, italien et romanche. Les particularismes frontaliers ont fait naître une culture remarquablement riche qui imprègne toutes les villes, tous les villages. À Genève, Zurich et Lucerne, les ruelles médiévales s’ouvrent sur des places émaillées de cafés débridés, les sièges de grandes institutions côtoient tables en vogue, parcs proprets et promenades aménagées.
Le charme discret de Neuchâtel contraste avec l’aura (méritée) de Montreux. Sur la scène artistique, Berne, Bâle ou encore Lausanne tirent leur épingle du jeu. Street-art, galeries de haut vol et musées prestigieux fleurissent. Aux quatre coins du pays, un fil conducteur : l’eau. Chaque cité jouxte une rivière, un fleuve ou un lac parfois immense – la Suisse compte même deux rivieras à son actif, sur le lac Léman et aux abords de Lugano, dans le Tessin.
Show ferroviaire
Au pays des Helvètes, le réseau ferré conduit partout, ou presque. Dans la conception des lignes comme des trains eux-mêmes, les ingénieurs ont tenu compte du relief et du cadre pour créer des expériences ferroviaires aussi pertinentes que spectaculaires. Les wagons, bien souvent panoramiques, permettent l’observation ambulante de paysages majestueux. Les centaines de tunnels, ponts et gares s’apparentent à des ouvrages d’art intégrés à leur environnement.
En deux heures, le Luzern–Interlaken Express croise pas moins de cinq lacs et passe en traction à crémaillère pour grimper vers le col du Brünig. La Golden Pass Line file ensuite vers Montreux ; après villages, lacs et pics, l’arrivée sur le lac Léman éblouit. De Zermatt à Saint-Moritz, le bien-nommé Glacier Express enchaîne tunnels, ponts, cols et tronçon de l’Albula, estampillé Unesco. Par le Bernina Express, on peut alors gagner l’Italie. Des alpages aux palmiers, il n’y a qu’un pas.
Nicolas Quiniou
In the mood
Aux beaux jours, la Suisse regorge d’activités outdoor : vélo à travers les vallées ondoyantes des Grisons, dégustation dans les vignobles en terrasses du Lavaux, rencontre avec des producteurs artisanaux dans une ferme d’alpage, baignade dans les torrents pour s’initier au “cold plunge”, ces bains froids aux vertus anti-stress ! L’hiver, l’expérience suisse est tout simplement magique ! Embarquez parents, belle-famille et enfants à bord du train Glacier Express et passez Noël dans les montagnes. À Zermatt ou Saint-Moritz, même programme : poudreuse, fondue, air frais, courbatures et bronzage abstrait.
À la croisée de trois pays, Bâle, ville aux quarante musées conçus par d’illustres architectes (Renzo Piano pour la Fondation Beyeler, Mario Botta pour le musée Tinguely ou encore Herzog & de Meuron avec le Schaulager), la créativité règne. Vous poussez la porte de l’enseigne Grimsel, antre du design et de la singularité. Vous découvrez le Kunstmuseum, premier musée d’art public au monde dont les prémices remontent à 1661. Vous flânez sur les campus Vitra ou Novartis, qui dissimulent des œuvres signées Richard Serra, Claudia Comte, Tadao Ando, Zaha Hadid ou Frank Gehry. À Genève ou Lucerne, vous vivez au rythme de l’eau. Tout en douceur…
Photographie de couverture : Nicolas Quiniou